J’ai grandi dans le pays des bisounours, la Norvège, où on regarde ce qui se passe dans le reste du monde avec empathie en soupirant
Les manifestations de Saint Germain et ce qu’elles m’ont apporté.
Je n’avais jamais manifesté avant dans ma vie. J’ai grandi dans le pays des bisounours, la Norvège, où on regarde ce qui se passe dans le reste du monde avec empathie en soupirant, tout en étant soulagé de vivre dans un si beau et paisible pays avec peu de corruption et peu de conflits sociaux. Les Norvégiens se sentent si privilégiés et chanceux que se plaindre ne se fait pas trop. Se mettre en colère, râler, sortir des rangs n’est pas très bien vu non plus, surtout pas avec un gouvernement si honnête et la chance « que nous avons ». Il y a un consensus très large là-dessus. On regarde parfois d’un œil sévère les Français, toujours dans la rue, toujours en train de se plaindre, de râler, et surtout « de déranger » les autres, la société ; chose peu appréciée dans la culture scandinave, basée sur le consensus et sur une certaine discipline. En Norvège, j’étais bercée dans l’illusion que tout va bien et qu’on s’occupera de moi. J’ai quitté mon pays pour la première fois à 19 ans.
Je voyage, je fais la fête, j’étudie ce que j’aime : les langues et les lettres. Je travaille dans un pays étranger. Ça implique quelques défis, je l’avoue, mais quand on est jeune et sans enfant, on est capable de tout. On s’adapte. Je rencontre mon amoureux, les enfants arrivent, on s’installe. Nous faisons même 4 ans d’expatriation à Prague pour le travail de mon chéri pour un retour en France en juillet 2019.
Le fait d’avoir des enfants change évidemment tout pour moi. D’une vie franchement insouciante, je dois apprendre à porter cette grosse responsabilité. C’est effrayant, et en même temps passionnant et épuisant et tout ce que tu veux. J’avale une multitude de livres sur la nourriture, la santé, la naturopathie, l’homéopathie. Mon premier a une mauvaise réaction à un vaccin qui ne s’avère même pas obligatoire. Je suis en colère, et j’apprends petit à petit que je dois me renseigner sur TOUT moi-même. Je ne peux pas dépendre des autres puisqu’ultimement c’est moi qui suis responsable pour ce que je mets dans le corps de mes enfants, pas le médecin. C’est une leçon qui aura son importance !
Une fois que je commence à comprendre l’arnaque, je suis de plus en plus révoltée à l’intérieur de moi et je sens le masque comme une agression sur mon visage, comme un gros abus de pouvoir.
Arrive le confinement et tout ce que nous avons connu. J’ai peur au début, mais je commence très tôt à m’étonner de ce qui se passe. Je me renseigne et j’ai la chance d’avoir de bons amis en Norvège où les autorités appliquent des mesures semblables à celles de la France. Une fois que je commence à comprendre l’arnaque, je suis de plus en plus révoltée à l’intérieur de moi et je sens le masque comme une agression sur mon visage, comme un gros abus de pouvoir. Quand c’est le tour des enfants de le mettre à l’école, je suis folle de rage, ensuite de désespoir et d’un profond sentiment d’impuissance. Je me trouve obligée de maltraiter mes enfants contre mon gré, alors que je veille sur eux depuis leur naissance !
Je m’agite dans tous les sens, d’abord j’écris à l’école, à la directrice. Ensuite je comprends que je dois trouver d’autres mamans comme moi, et heureusement, j’en trouve. Je fais mes premiers tractages et mes premières manifestations contre le masque. Je me rappelle encore ma toute première à Paris au mois de décembre 2020. On n’était pas nombreux, mais Ingrid chantait pour nous. Il y avait un soulagement qui venait avec le fait d’agir. Le fait de mettre le masque sur les visages de mes enfants tous les jours, me démangeait, m’étouffait, me rendait plus malheureuse que je ne l’avais jamais été. Beaucoup de personnes dans mon entourage proche ne pouvaient pas complètement comprendre ce que je ressentais et me trouvaient assez extrêmes. Mais pour moi c’était déchirant et contre nature. Je ne pouvais presque pas penser à autre chose. Mon esprit ne trouvait plus ni repos ni apaisement sauf pendant les vacances scolaires. Juste avant les vacances d’été de 2021 je pense que j’étais proche du burn out, à bout. On faisait des actions auprès du conseil d’Etat, quelques manifestations à Paris, à plusieurs mois d’intervalle, et rien ne bougeait !
Il fallait résister et une vague de résistance s’était levée en France. Je voulais définitivement en faire partie.
Heureusement les vacances sont arrivées et j’arrive à me ressourcer en famille. Quand on rentre en France, Jean-Marc, que j’ai rencontré lors d’une manifestation pour les enfants à Paris, m’appelle. Il lance des actions de manifestations locales et il a besoin d’un responsable de sécurité à Saint-Germain. Est-ce que je peux l’aider ? OUI ! La démangeaison n’a pas cessé. Quand je m’agite, mon mal-être cède pour un moment. De plus, les annonces de Macron le 12 juillet marquait un changement net. Il fallait résister et une vague de résistance s’était levée en France. Je voulais définitivement en faire partie. Je pensais, enfin, on sera nombreux !
Les manifestations à Saint-Germain ont été un exutoire pour moi, pour ma peine. Un antidote à l’impuissance que je ressentais au fond de moi. J’ai enfin pu exprimer, à coté d’autres personnes qui comprenaient et partageaient ma peine en voyant toute cette destruction, ce que je ressentais à l’intérieur de moi. Il y avait de l’entre-aide, de l’empathie, de belles rencontres et les samedis étaient une façon de se recharger d’espoir. Je retrouvais du plaisir et du bonheur en plein milieu de ce temps si compliqué grâce à elles.
Ça m’apaisait d’apporter du soutien aux soignants, rappeler l’importance de protéger les enfants, montrer à vos côtés mon désaccord avec la discrimination organisée dans la société ! Et ça m’a permis de rester à flot, ne pas couler en même temps.
Les actions que nous posons sont toutes des manifestations du pouvoir créateur que nous avons en nous.
Maintenant je comprends mieux les mouvements de grèves qu’il y a eu en France. En tout cas, je comprends que face à une grande injustice, se lever et marcher devient essentiel et de le faire ensemble donne de la force. Je n’ai jamais douté de l’utilité de manifester depuis le début. Puisque mon cœur chante quand je le fais, ça ne peut pas être une mauvaise chose. Au moins, c’est ce que je pense à titre personnel.
Le fait de revendiquer ce que nous pensons est très puissant en terme d’énergie et de vibration aussi. « Manifester », rendre manifeste, devenir visible, faire connaître publiquement ce qu’on est, se révéler… Manifester sa pensée est vitale pour l’être humain et l’a toujours été et la pensée manifestée ainsi est créatrice. Manifester à travers le rassemblement, à travers la musique, l’art, l’écriture. C’est une manière de faire vivre la vérité des hommes. Il y en a beaucoup. Et même si les manifestations prennent une autre forme pour un temps à Saint-Germain ou pas, nous ne cesserons pas de nous manifester. Les actions que nous posons et l’état d’esprit que nous véhiculons sont toutes des manifestations du pouvoir créateur que nous avons en nous.
Les pavés de Saint Germain sont désormais imprégnés de cet esprit de liberté, les vibrations de nos pas y resteront et je pense que chaque pas compte.
E.