Tout n’est pas complot.. mais il y a des complots
Avant tout, il propose d’utiliser la raison pour déconstruire le complotisme en se basant sur deux raisonnements distincts :
- Tout n’est pas complot, ce qui est une conception policière de l’Histoire, vision théâtrale et infantile. Mais il y a des complots, il n’y a pas que le hasard. En ce sens, Baudelaire affirmait que « La plus grande ruse du diable est de nous faire croire qu’il n’existe pas. »
- Il propose également de faire un exercice d’histoire contrefactuelle : par exemple, si Bilderberg n’avait pas existé, est-ce que la mondialisation ne se serait pas produite ? Oui, bien sûr. Et nous pouvons convenir que cette Assemblée joue un rôle dans ce domaine. Il nous reste plus qu’à chercher et définir exactement l’étendue de son pouvoir ainsi que son impact réel sur le monde.
Laurent Henninger dénonce plusieurs biais généraux :
- L’argument-réflexe des anti-complotistes, l’amalgame du « complotisme » avec le monde ésotérique.
- Le plaisir de se faire peur. Le complot, c’est « la bête immonde » !
- La paresse évite de creuser l’information.
- L’abrutissement des consciences, simplisme et manichéisme conditionnent les esprits qui se donnent bonne conscience à bon compte en faisant l’économie de la réflexion, pour éviter la prise de tête. Le mot « intello » devient dépréciatif.
- Par idéologie, refus de réfléchir. Idéologie de l’antifascisme (qui reprend elle-même les réflexes du fascisme) dégaine à tout bout de champ l’accusation « fasciste ! ». Ce refus de comprendre est nourrit par son propre discours de refus de la réflexion.
- La myopie volontaire de ne pas voir les choses dans la globalité.
Mais les professionnels, c’est-à-dire les historiens eux-mêmes ne sont pas en reste et expérimentent également plusieurs biais :
- Le marxisme mal digéré pour qui il n’y a que des rapports de force, pas de hasard ou d’individus infléchissant le cours de l’histoire.
- La Nouvelle Histoire mal digérée où la longue durée noie l’évènementiel.
- Un dispositif post-moderne selon lequel toute pensée politique et stratégique est automatiquement disqualifiée avant d’être interdite. Actuellement, dans la recherche historique, il y a un refus de penser la totalité, une impossibilité de travailler sur des questions globales qui rend peu compréhensibles les tenants et les aboutissants d’un complot et donc le complot-même. Est interdite la recherche d’un sens historique, le principe de causalité aristotélicien. Par exemple, les classes dirigeantes n’auraient aucune stratégie alors que le fait qu’elles aient atteint le pouvoir et qu’elles le gardent démontre le contraire. Le propre d’une classe dirigeante c’est de penser en permanence en termes de stratégie et de puissance. La pensée postmoderne veut nous faire croire qu’il n’y a rien.
Comment un historien peut identifier un complot possible ?
Par exemple par la perspective historique. Dans les thalassocraties anglo-saxonnes, on trouve forte prégnance de leur domaine d’excellence : le cadre de référence maritime, notamment le droit maritime. Une notion juridique tirée du monde maritime est le false flag, l’attentat sous fausse bannière. De manière répétées, les États-Unis rentrèrent souvent en guerre après des accidents curieux, la destruction ou le sabotage de navires (sauf deux exceptions : la Guerre de Sécession et La guerre de Corée).
1773 Tea Party de Boston, étape décisive dans le déclenchement de la révolution américaine.
1898 Le cuirassé Maine explosa dans le port de La Havane. C’est l’un des éléments déclencheurs de la guerre hispano-américaine.
1915 Le paquebot Lusitania. Son torpillage fut un des éléments qui poussa l’opinion américaine à entrer en guerre.
1941 L’attaque de Pearl Harbour provoque l’entrée en guerre des États-Unis.
1964 Les incidents du golfe du Tonkin. Des torpilleurs nord-vietnamiens auraient échangé des tirs de canons avec deux destroyers américains, ce qui justifia l’entrée en guerre des États-Unis contre le Nord-Vietnam.
Cette énumération sur deux siècles et demi nous incite à conclure que cela ne peut être une succession de hasards. Mais inévitablement il n’y aura pas de preuves car, entre autres précautions, ces décisions se prennent sans notes ou les archives ne peuvent être ouvertes que très longtemps après les faits.
Ces manipulations sont le propre des démocraties qui doivent justifier leurs exactions à la différence des dictatures qui le font à leur guise, sans règles morales à observer. Depuis les pères fondateurs, les États-Unis se sont toujours présentés comme un peuple de commerçants pacifiques et qui donc ont besoin de provocations, de casus belli pour faire la guerre.
Pour le 11 septembre, les États-Unis n’ont eu qu’à laisser faire les attentats dont ils avaient connaissance des préparations (comme Pearl Harbour), afin de favoriser leur reprise en main du monde après la chute du bloc soviétique. Il fallait renverser l’échiquier pour reconfigurer le monde à leur avantage et consolider leur statut d’unique hyperpuissance.
Nous en concluons que le complot est donc un mot théâtral, synonyme de stratégie.