Valence, réquisitoire pour un massacre 1

Par inconscience ou duplicité, les autorités font tout pour qu’une catastrophe naturelle impacte au maximum une population sinistrée. Puis elles interdisent aux pouvoirs publics ou aux initiatives privées toute aide aux victimes. Nouvelles méthodes de coercition des masses, laboratoire d’ingénierie sociale, voici une nouvelle bataille de la guerre contre les peuples, déjà expérimentée en plusieurs points du globe.

1 Corruption écologiste

En Espagne, Les 29 et 30 octobre 2024, la ville de Valence a connu des inondations d’une violence inouïe. Elles ont dévasté et désorganisé la cité et ses alentours. Nous prétendons que l’attitude des autorités face à cette catastrophe est tout à fait révélatrice d’un nouveau modèle de gestion de crise désormais appliqué par les gouvernements occidentaux. Il s’agit non seulement d’une inaction volontaire, mais aussi d’entraves aux secours, dans le but prémédité d’aggraver une situation sociale locale. Nous sommes ici dans le cas d’un contrôle des populations par le chaos, la mort, la précarité et la pauvreté. Nous prenons le pari que cette méthode continuera à s’appliquer dans les catastrophes futures.

Méthode

Au début de cette étude un point méthodologique s’impose. Comme nous l’expérimentons de plus en plus, la véritable information n’est pas toujours délivrée par les médias officiels mais par les réseaux sociaux. Ceux-ci produisent souvent une information plus fraîche et inédite que les organes de presse de référence, surtout sur un sujet aussi sensible. Voilà pourquoi nos sources ont été principalement différents groupes Telegram, agrégateurs d’informations sans pareille. On pourrait en être dubitatif, surtout si certains ont des noms qui peuvent paraître farfelus et nous faire douter de leur sérieux. Cependant, on a pu observer que dans des circonstances aussi graves et extraordinaires, ils se sont révélés extrêmement professionnels et utiles tant aux sinistrés qu’aux simples citoyens. Cet article s’appuie sur un thésaurus à ce jour de 117 messages Telegram qui en agrègeront d’autres, au fur et à mesure. Dans le corps de ce texte, des liens pointeront sur ces articles ou les messages de référence.

Enfin, la précision que requiert tout réquisitoire nous oblige à détailler les faits en un fonds de témoignages concordants, d’où la longueur de ce texte qui sera délivré en plusieurs épisodes.

Destruction des barrages

En 2022, Valence était très fière de définir son modèle de ville pour la prochaine décennie avec son plan d’action local dans le cadre de la stratégie urbaine 2030, aligné sur le Green Deal européen « c’est-à-dire sur le cadre de référence européen, et sur les lignes directrices des Nations unies à travers les Objectifs de développement durable, ODD, et l’Agenda urbain ». À quoi cela faisait-il référence ?

L’Agenda 2030 des Nations Unies ordonna en 2015 la destruction de barrages et de réservoirs pour rétablir le cours naturel des rivières, sans tenir compte du risque évident et de la vulnérabilité des communautés face à sa « politique verte ». Mais l’Union européenne l’avait précédée.

En 2000, elle publia la directive-cadre sur l’eau, visant à créer des conditions favorables aux animaux dans les zones humides. Il s’agissait de rétablir la dynamique écologique et géomorphologique des rivières régulées au profit de la biodiversité, des macrophytes, des macro-invertébrés benthiques et des poissons, dont les populations de truites brunes (Salmo trutta). Pour ce faire, une nouvelle directive de 2022 prévoyait la suppression des barrages afin de « contribuer à la connectivité naturelle longitudinale et latérale des rivières et à l’objectif de l’UE de disposer de 25 000 km de rivières à courant libre » et « de contribuer à la restauration des zones fluviales et des plaines inondables ». Ainsi, en 2023, 487 barrages ont été démantelés dans 15 pays européens, soit 50 % de plus que l’année précédente. En 2021, l’Espagne a supprimé 108 barrages hydrauliques sur son territoire, plus que n’importe quel autre pays d’Europe. Un rapport publié en 2021 par la branche espagnole de l’ONG WWF a identifié 5 400 barrages comme prioritaires à la démolition en Espagne. Tragique ironie, en pleine crue, le PSOE (Parti Socialiste) publia un plan afin de préserver les lits des rivières si cela mettait en danger l’habitat potentiel des visons.

Dans ce cadre, pas moins de 40 barrages et retenues ont été détruits en 60 ans autour de Valence alors qu’un stock d’eau y est crucial vu la rareté des précipitations en saison sèche.

Carte des barrages volontairement détruits aux alentours de Valence.

La goutte froide

Autre phénomène renforçant cette situation dégradée, la “goutte froide” (gota fria) ou D.A.N.A. (soit en français Dépression Isolée en Haute Altitude). Plus précisément, une poche d’air très froid à plus de 5 000 mètres se détache de son courant d’air initial, du fait de changements brutaux dans la pression atmosphérique. Cela a lieu surtout à l’automne, à cause notamment de l’interaction entre l’air chaud et humide résiduel en Méditerranée, et l’air froid polaire. Conséquence, des pluies soudaines très violentes, un phénomène météorologique habituel à cette saison dans la zone méditerranéenne.

Les géologues ont étudié les différentes inondations exceptionnelles dans la région de Valence du IIe siècle avant JC à nos jours, la plupart (75) entre le XIVe et le XIXe siècle, les archives et éléments historiques abondent sur le sujet. La précédente, en 1957, a fait 81 morts. Tout concorde pour affirmer que ces phénomènes météorologiques extrêmes font partie de la normalité climatique de la région.

Ces pluies diluviennes ont pu atteindre jusqu’à 500 litres d’eau par mètre carré (un demi mètre cube !). Elles ont grossi brutalement les cours d’eau qui charrièrent boue, pierres, morceaux de bois et tout ce qui était emporté sur leur passage. Seulement, plus de barrages, désormais détruits, pour réguler le flot. Celui-ci se fit dévastateur et il en résulta les ravages observés, y compris dans des zones ayant reçu peu de pluie. Dans certaines communes de la région valencienne, les eaux s’élevèrent jusqu’au plafond des pièces, des voitures furent emportées par les flots comme des fétus de paille. On les retrouva entassées les unes sur les autres lors de la décrue.

Des mises en garde restées lettres mortes

Les 28 et 29 octobre, l’ambassade du Japon a averti par SMS les résidents japonais en Espagne du danger de la goutte froide. 24 heures avant, le CIFAS, Centre d’intelligence des forces armées, prévenu par le canal militaire de la NASA, a répercuté l’information au DSN (Département de Sécurité National), au Chef d’État-major des armées, au cabinet du premier Ministre et à la Generalitat de Valence. 12 h avant le début du sinistre, la Sécurité Civile espagnole a également prévenu l’exécutif de l’imminence de l’ouragan. Le matin même du 29 octobre, AROME-HD de Météo France prévoyait avec une grande justesse « des précipitations de 400 litres/m2 qui pourraient mettre la vie en danger » alors que son équivalent espagnol, la Aemet n’envisageait qu’entre 150 et 180 litres / m². Malgré tout cela, l’inaction des autorités fut éclatante et interroge sur une éventuelle nouvelle forme de gouvernance contre le peuple.

Corruption hydrographique

Certains actes peuvent passer pour des maladresses inconscientes. Par exemple, le maire de la ville d’Algemesí affirme « le réservoir de Forata a été ouvert et le débit de la rivière a augmenté ». D’autres témoins confirment « Ils avaient ouvert le barrage et ça avait provoqué la vague (…) Ils ont libéré une vague géante et cela a provoqué la catastrophe (…) un film d’horreur ». Et les populations locales n’ont pas été prévenues, ou trop tard.

D’autres relèvent franchement de la corruption. La Confédération Hydrographique du Júcar a omis l’alerte écrite, exigée par son protocole, à 15 reprises au cours de l’heure et demie clé de l’inondation du ravin de Poyo. La Confédération n’a pas informé la Generalitat que le ravin augmentait son débit de 100 fois, bien que la loi l’exige. Mais il y a plus grave. Elle a faussé les résultats des relevés de la montée des eaux en oubliant un zéro, 200 m² comptabilisés au lieu de 2000. Puis elle a republié les données sur la crue du ravin de Poyo après les avoir supprimées en raison de prétendus problèmes techniques, mais une partie des données qui apparaissaient quelques jours plus tôt n’apparaissent plus.

Plus précisément, les données de flux après 19h00 le 29/10 démontrent qu’après la première crue, qui a atteint des valeurs de près de 2000 m3/s, il y a eu au moins deux augmentations très considérables par la suite, dès l’aube : l’une entre 13h00 et 16h00 le 30 et l’autre à 18h00, impactant le maximum de gens à la sortie des bureaux et dans les centres commerciaux.

Le président de la Généralité Carlos Mazón dit qu’il n’a pas alerté la population par téléphones portables parce que la Confédération hydrographique a désactivé l’alerte « trois fois ». Le ministre de la transition écologique lui répond que les confédérations hydrologiques n’ont pas compétence pour lancer des alertes. Bref, dans ce panier de crabes, beaucoup se défaussent, fuient toute responsabilité. Au final, « Ils ont donné l’alarme alors que j’étais dans un arbre depuis 6 heures. » Six heures avant, Mazón assurait que la tempête s’était calmée, mais au même moment la Députation de Valence a renvoyé ses agents chez eux le mardi 29 octobre à 14 heures « en raison d’un risque très élevé pour la population ».

(À suivre)

Yann et Lux

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